LA TURQUIE ALOURDIT SES SANCTIONS CONTRE LA SYRIE

La guerre économique contre Damas franchit une étape avec l’augmentation des tarifs douaniers.

Le poste frontière de Nusaybin entre la Turquie et la Syrie, fermé pour cause de "maintenance"

Le ministre turc du Commerce et des Douanes, M. Hayati Yazici, a annoncé mercredi  7 décembre l’établissement de nouvelles sanctions contre le régime de Bachar el-Assad, parmi lesquelles la levée d’une taxe de 30% sur les marchandises venant de Syrie.

Ces décisions viennent compléter l’éventail de sanctions imposées à Damas par le gouvernement turc le 30 novembre dernier, parmi lesquels une interruption des transactions commerciales avec le gouvernement syrien et la Banque Centrale syrienne, ainsi qu’un gel des avoirs du régime al-Assad en Turquie.

Damas avait répliqué en suspendant un accord de libre-échange passé en 2004 après de longues négociations avec Ankara. La Syrie avait aussi augmenté ses tarifs douaniers avec la Turquie et ses prix pétroliers, et mis des entraves au transport routier entre les deux pays.

Mercredi le ministre de l’Economie turc, M. Zafer Caglayan, annoncait à cet égard que la Turquie commencerait dès cette semaine à exporter sa production vers l’Egypte à travers l’Irak et la Jordanie, pour contourner les routes commerciales syrienne utilisées jusque là.

Accrochage

Accusé d’accueillir à Istanbul le Conseil National Syrien, principal groupe d’opposants au régime, la Turquie est également soupçonnée d’abriter près de la ville d’Antakya, non loin de la frontière, des camps de l’Armée Syrienne Libre, formée de déserteurs de l’armé régulière du régime.

Damas s’insurge régulièrement contre l’entrée de ces « groupes terroristes armés » sur son territoire. Après un accrochage mardi soir au cours duquel des gardes frontières syrien ont mis en fuite un groupe d’une quarantaine d’individus, la Turquie s’en est défendue hier sans désigné ouvertement son voisin, en affirmant qu’elle n’ « autorisait pas des groupes armés a lancer des attaques contre d’autres pays » .

Une déclaration salué par le gouvernement syrien, qui a toutefois décider de fermé jusqu’à nouvel ordre le poste-frontière de Nusaybin, le long de la frontière avec la Turquie,  pour cause de « maintenance« .

Hier matin un attentat à la bombe a par ailleurs gravement endommagé l’oléoduc principal reliant les champs de pétrole à l’est du pays à la ville de Homs.

Ankara et Washington « perdent patience »

Ces événements surviennent alors qu’Istanbul a accueilli samedi dernier le vice-président américain Joe Biden, en visite dans la région pour officialiser le départ des troupes américaines d’Irak.
Il a rencontré en début de semaine à Bagdad le Premier ministre Nouri al-Maliki, souvent accusé de collusion avec l’Iran. Le gouvernement irakien, qui n’a pas voté les sanctions de la Ligue Arabe contre la Syrie, craint qu’une chute du pouvoir chiite à Damas n’offre une base arrière aux groupes sécessionnistes sunnites de la province occidentale d’al-Anbar.

Lors d’une conférence de presse avec le président turc, M Abdullah Gül, M. Biden a affirmé que l' »influence iranienne diminue dans la région » et souligné sa « conviction, que partagent les Turcs, qu’Assad et son régime sont actuellement la source d’instabilité en Syrie et posent le plus grand risque d’attiser les conflits confessionnels, pas seulement en Syrie mais au-delà » .

Il a ajouté que les Etats Unis et la Turquie « perdent patience et demande au président Assad de se retirer » .

A noter pour conclure,  M. Ahmet Davutoglü, l’omniprésent ministre des Affaires Etrangères turc, assistera au sommet OTAN/Russie ce jeudi à Bruxelles. Crise syrienne et radar turc seront à n’en pas douter au cœur des discussions.

Le + du Grand Turc : Alors qu’Ankara alourdissait sa pression sur l’économie syrienne, Bachar al-Assad donnait mercredi à la chaine américaine ABC une interview surréaliste où le dictateur récusait toute responsabilité dans la répression. « Ce reproche n’est pas crédible […] Je ne suis pas roi« ,  a-t-il déclaré avec le plus grand sérieux, « ce n’est pas mon armée personnelle » .

Après avoir soutenu que la plupart des 4500 morts étaient en réalité des « supporters » du régime, tués par la résistance, il a conclu en soulignant qu’il faudrait être « fou » pour donner de tels ordres.

Pour une fois il ne croit peut-être pas si bien dire.

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SYRIE: ANKARA MET SES MENACES A ÉXÉCUTION

Ankara emboite le pas de la Ligue Arabe en annonçant ce matin une série de sanctions économiques contre le régime syrien.
En réaction, la Russie envoie sa flotte en méditerranée.

Le ministre des Affaires Étrangères turc Ahmet Davutoglü considère que le régime syrien est « dans l’impasse »

Après de nombreux ultimatums et autant d’appels au calme, la Turquie a finalement mis ses menaces à exécution.

Huit mois après le début de la répression en Syrie, le ministre des Affaires Etrangères turc M.Ahmet Davutoglü a annoncé ce matin une série de sanctions économiques contre Damas assortie d’un embargo sur les armes.
En plus du gel des transactions commerciales et des transactions financières entre les banques centrales des deux pays, la Turquie stoppe toute coopération stratégique avec son voisin.
M Davutoglü a toutefois officiellement rejeté l’idée de couper les livraisons d’eau ou d’électricité, comme l’avait pourtant évoqué la semaine dernière le ministre de l’Energie Taner Yildiz.

Ces sanctions sont l’aboutissement d’un effort diplomatique coordonné avec la Ligue Arabe pour faire plier le régime el-Assad.
Réunis au Caire dimanche dernier en présence de M. Davutoglü, les ministres des Affaires Etrangères de l’organisation ont pris une série mesures de similaires, ainsi que le gel des avoirs syriens et l’arrêt des liaisons aériennes avec Damas.

La Syrie a été suspendu de la Ligue Arabe le 12 novembre dernier alors que l’ONU estime à plus de 4000 le nombre de civils tués depuis le début des troubles en mars, dont au moins 200 mineurs torturés à mort.

« GUERRE ÉCONOMIQUE » 

Avec ce train de sanction, le régime de Damas se trouve dans une situation précaire, qualifié par son ministre des Affaires Etrangères, Walid Al-Moallem, de véritable « guerre économique ». La Syrie, qui dispose de peu de matières premières,  réalise la majorité de ses exportations avec ses voisins arabes et turcs.

De son côté, la Turquie perd là un partenaire économique qui gagnait en importance ces dernières années.
Très dépendante de son commerce extérieur, la Turquie a besoin des routes syriennes pour exporter ses produits vers le reste du Machrek. Après avoir aboli l’obligation de visa en 2009, le volume des échanges entre les deux pays avait atteint 2.5 milliards de dollars l’an dernier.

Interrogé sur la question, le ministre turc des Transports, Binali Yildrim, a annoncé mardi qu’Ankara prévoyait l’ouverture de nouveaux postes frontières avec l’Irak, qui est appelé selon lui à devenir « la nouvelle route commerciale » de la Turquie.

LA RUSSIE HAUSSE LE TON

L'Amiral Kouznetov, le seul porte-avions russe, en route pour les côtes syriennes. Moscou assure que ces manoeuvres étaient prévues de longue date.

Autre source d’inquiétude à Ankara, les tensions grandissantes avec Moscou qui est aussi son premier partenaire énergétique.

Après avoir bloqué le mois dernier à l’ONU le projet de résolution contre le régime de Bachar-el-Assad, le ministre russe des Affaires Étrangères Serguei Lavrov, s’est insurgé hier contre l’ « injuste » embargo sur les armes imposé à la Syrie.
La Russie, qui lui aura fourni cette année pour 3.5 milliards de dollars de matériel militaire, s’occupe principalement de la modernisation de ses forces armées (chars T-72, Mig-29…) et l’installation de batteries de missiles sol-air S-300.

L’amirauté russe a d’ores et déjà annoncé le déploiement avant la fin de l’année d’une partie de sa flotte, notamment son unique porte-avions, le Kouznetsov, au large du port de Tartous où Moscou dispose d’une base permanente.

La Turquie quand à elle, si elle rejette toujours le principe d’une intervention militaire, s’est toutefois déclaré prête « à tous les scénarios« .

Le + du Grand Turc: le rapprochement des frères ennemis se poursuit : après la visite la semaine dernière d’Alain Juppé à Ankara, la France a invité la Turquie à la réunion des ministres des Affaires Étrangères européens demain à Bruxelles pour évoquer le cas syrien.
Une première qu’en toute subjectivité la rédaction du Grand Turc applaudit des deux mains.

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LA LIGUE ARABE SOUTIENT LA TURQUIE CONTRE DAMAS

Après avoir exclu temporairement la Syrie, la Ligue Arabe a lancé hier à Rabat un nouvel ultimatum à Bachar al-Assad.

Ahmet Davutoglü et le ministre des Affaires Etrangères marocaines M.Taib Fassi Fihri hier a Rabat lors du sommet.

La Ligue Arabe réunie hier a Rabat, au Maroc, a décidé de donner à Bachar el-Assad 3 jours pour mettre fin à la répression des manifestations, libérer l’ensemble des détenus politiques et accepter la venue de 500 observateurs.

Si ce n’est pas le premier, cet ultimatum intervient moins d’une semaine après que l’organisation ait décidé d’exclure temporairement la Syrie pour dénoncer les exactions qui ont fait depuis le début des troubles en mars près de 3500 morts selon l’ONU. Concrètement les diplomates syriens ne peuvent plus assister aux réunions.
La Ligue a déjà eut recours à ce procédé par le passé, notamment en 1979 quand elle exclut l’Égypte après la ratification des accords de Camp David avec Israël. Dernièrement c’est  la Libye de Kadhafi qui avait également été suspendu en février dernier.

Si Damas ne respectait pas cette feuille de route (qu’elle affirme pourtant appliquer depuis deux semaines), la Ligue pourrait alors confirmer cette suspension ou décider de son exclusion définitive, une décision peu réaliste qui demanderait l’unanimité des ses membres. De nouvelles sanctions économiques sont également envisagées.

Elle a toutefois rappelé, dans une déclaration commune avec la Turquie, son opposition à toute intervention étrangère.

UN APPUI ARABE

Présente lors des discussions en tant qu’observateur, la Turquie a salué la décision de la Ligue: « le régime syrien va payer très cher ce qu’il a fait »  confiait hier le ministre turc des Affaires Etrangères M. Ahmet Davutoglü aux journalistes qui l’accompagnait au Forum de Coopération Turco-Arabe qui s’est tenu en marge de la réunion , « on lui a donné une dernière chance mais elles [les autorités syriennes] ne l’ont pas saisi […] l’isolement est ce prix à payer pour ne pas avoir tenu ses engagements envers la communauté internationale».

 Le chef de la diplomatie turque avait reçu la veille le Conseil National Syrien, qui rassemble une importante partie des partis d’opposition au régime d’al-Assad, ceci pour la deuxième fois en moins d’un mois. Les membres du conseil, accueillis a Istanbul depuis le virage sanglant de cet été, en ont profité pour réitérer leur souhait d’obtenir une représentation permanente en Turquie. La décision en revient au Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, qui ne s’est pas encore prononcé qui le sujet.

Ancien allié de Damas,  aujourd’hui en première ligne de la bataille diplomatique, Ankara reçoit un appui arabe fort à ses menaces répétés.
Lundi le ministre de l’énergie turc, M. Taner Yildiz, a annoncé que la compagnie pétrolière publique turque, la TPAO, cessait toute coopération avec son homologue syrien en matière de prospection.
Il a évoqué la possibilité pour la Turquie de ne plus approvisionner son voisin en électricité.

Quelques heures plus tard, le Premier ministre Erdogan, qui comptait il y a peu parmi les amis personnels de Bachar al-Assad, déclarait lors d’une réunion de l’AKP qu' »on ne peut plus lui faire confiance » et que la Syrie est « sur un chemin dangereux », « au bord du gouffre », et doit « faire marche arrière ». « L’histoire de souviendra de ceux qui se nourrissent du sang de leur peuple » a-t-il conclu a l’adresse de son homologue syrien.

JUPPÉ À ANKARA

Ce regain de tension fait suite à l’attaque des représentations diplomatiques turques samedi après l’annonce de la suspension de la Syrie.

Des milliers de manifestant, armés de bâtons et de couteaux, ont notamment  brûlé le drapeau au croissant, un geste hautement symbolique dans la conscience collective turque. Ankara demande des excuses officielles, en plus de celle prononcés peu après par le ministre syrien des Affaires Etrangères Walid al-Moualem, et a fait évacués les familles de ses diplomates.

Appuyé par les régimes arabes, la Turquie peut également compté dans ce bras de fer sur le soutien de la France, dont les représentations consulaires ont également été attaquées par les manifestants.

Le ministre des Affaires Étrangères, Alain Juppé, qui a déclaré s’entendre « parfaitement » avec la Turquie sur le dossier syrien, a annoncé hier le rappel de l’ambassadeur français à Damas et doit se rendre aujourd’hui à Ankara pour évoquer l’avenir d’un régime qu’il a qualifié d’« autiste » devant l’Assemblée Nationale.

Le début d’un rapprochement ?

Le + du Grand Turc

Le ministre de l’Energie turc M.Taner Yildiz, a annoncé qu’après avoir mis un terme à sa collaboration avec la Syrie, la TPAO s’apprêtait à signer avec le géant anglo-néerlandais Shell un accord pour la prospection de pétrole et de gaz off-shore.

 S’il n’a pas précisé dans quelles zones maritimes doivent avoir lieu les explorations, la décision intervient alors que la Turquie est en conflit avec la République de Chypre qui a décidé unilatéralement d’exploiter le gisement Léviathan qu’elle partage avec Israël. Ankara a déjà envoyé un navire de prospection dans les eaux de Chypre-Nord, qu’elle est seule à reconnaitre, et exige que Lefkosa soit associé aux exploitations de la partie sud de l’île.

Le + du Grand Turc

La décision turque de cesser toute collaboration pétrolière avec la Syrie a été « chaleureusement accueilli » à la Maison-Blanche à en croire le conseiller à la sécurité nationale Ben Rhodes.
Certains voient dans l’action combiné de la Turquie et de la Ligue Arabe l’aboutissement d’une manœuvre américaine visant a utiliser ses alliés sunnites dans la région pour contourner les blocages russe et chinois au Conseil de Sécurité de l’ONU. Le ministre turc des Affaires Étrangères, M. Davutoglü a plusieurs fois rejeté l’accusation d’être le « sous-traitant » de Washington : »ce n’est pas parce que les Etats-Unis ont pris position que nous devons détourner nos regard de ce qui se passe en Syrie » s’est-il ainsi défendu la semaine dernière devant le Parlement turc.

Le ministre russe des Affaires Etrangères, Sergei Lavrov, a en tout cas  officiellement regretté la décision de suspendre la Syrie de la Ligue Arabe.

Depuis un accord passé entre Moscou et Damas en 1971, la Russie dispose d’une base navale dans le port de Tartous, actuellement en rénovation pour accueillir l’an prochain des navires lourds, comme des frégates, des croiseurs ou des portes-avions. Cet accès direct sur la Méditerranée est d’une importance géostratégique cruciale pour le Kremlin.

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SEISME: LES FAMILLES RESCAPEES RELOGEES CHEZ L’HABITANT

Alors que les recherches de survivants ont pris fin, plus de 17 000 turcs ont accepté d’accueillir temporairement les rescapés du séisme.

Le gouvernement turc a officiellement repris à son compte un projet initialement lancé sur Twitter qui proposait aux citoyens turcs d’accueillir les familles laissées sans domicile par le séisme qui a dévasté la région de Van le 23 octobre dernier.

Plus de 17 000 personnes ont déjà répondu à l’appel et les 60 premiers relogés quitteront samedi prochain les camps de toiles installés par les autorités.

Le projet, appelé « Ma maison est ta maison, Van », a été à l’origine imaginé par un journaliste, Ahmet Tezcan, qui espère pouvoir profiter de ce drame pour rapprocher les populations turques et kurdes. «  Le tremblement de terre a libéré des sentiments fraternels qui ont été étouffés pendant 200 ans » explique-t-il, « ils ont jailli du sol avec le séisme ».

En 1999 le terrible tremblement de terre qui avait frappé l’ouest du pays, notamment la ville côtière d’Izmir, le long de la mer Egée, avait été le début d’un rapprochement historique entre Ankara et Athènes.

Près de 600 morts

La nouvelle intervient alors que les recherches pour trouver des survivants ont pris fin il y a quelques jours, après quelques miracles, comme un bébé de seulement 16 jours ramené indemne des décombres de sa maison avec sa mère et sa grand-mère.

Le bilan officiel fait désormais état de 596 morts et plus de 4000 blessés. Au total, ce sont plus de 5000 bâtiments qui se sont effondrés, laissant des dizaines de milliers de personnes sans abri.

Alors que près de 150 camions ont commencés à déblayer le terrain, le ministre de l’Environnement et de l’Urbanisme, Mücahit Demirtaş, a annoncé que le gouvernement renforcerait dès janvier 2012 la législation sur la construction pour mieux surveiller les méthodes des entreprises de BTP et s’assurer que les normes anti-sismiques soient respectées.

Le + du Grand Turc : Pendant les travaux, le terrorisme continue : le 28 octobre dernier, 5 jours seulement après le séisme, le PKK tuait deux policiers dans la province d’Osmaniye. L’opération intervenait le lendemain du retrait officiel des troupes turques de la vallée de Kazan, qui s’étend du nord de l’Irak à la province d’Hakkari, où 24 soldats avaient été tués dans une attaque militaire à la mi-octobre.

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LE SEISME NE CALME PAS LES TENSIONS AU KURDISTAN

Alors que le pays se mobilise pour venir en aide aux victimes du séisme de dimanche dernier, le Parlement turc a annoncé qu’il ne reporterait pas son débat sur la lutte contre le PKK .

Drame dans le drame: selon les autorités, seules 9% des maisons de la ville de Van étaient assurées contre les catastrophes naturelles

Le parti kurde BDP avait demandé son report hier mais le débat parlementaire sur le conflit au Kurdistan aura bien lieu, c’est ce qu’à décidé ce matin le Président de la Grande Assemblée nationale de Turquie, Cemil ÇiÇek, invoquant des raisons procédurales.

La discussion à huit-clos avait été prévue jeudi dernier après qu’une attaque du groupe séparatiste kurde PKK ait fait 24 morts au cours de 8 attaques simultanées dans la province de Hakkari.

Les députés du BDP, rejoint par de nombreux autres de divers sensibilités politiques, avaient demandé le report, voire l’annulation du débat parlementaire alors que les habitants de la province kurde de Van sont encore sous le choc du terrible séisme de dimanche dernier, qui a fait selon le dernier décompte 432 morts et près de 1500 blessés.

Le visage de l’unité

En déplacement lundi sur les lieux du drame, le chef du parti kurde,  Selahattin Demirtas, espérait profiter de la tragédie pour détendre la situation après trois mois de conflits.
Au milieu des gravats, il avait appelé à observation d’une trêve le temps de répondre à l’urgence humanitaire : « L’heure est aux soins et à la solidarité » avait-t-il déclaré « Nous réglerons nos différents plus tard ». Comme preuve de sa bonne  volonté, il avait retiré dans la foulée la motion de censure prévue à l’encontre du ministre de l’Intérieur, İdris Naim Şahin.

Il a tout de même tenu a remercié la population turque pour l’aide qui afflue de tout le pays sous forme de tentes et de couvertures : « Ce soutien est un signe de fraternité. Merci tout le monde » pouvait-on lire sur son compte Twitter.

Il n’est pas le seul a vouloir afficher le visage de l’unité. Le président turc Abdullah Gül se félicitait hier de voir que « chaque citoyen de l’est ou de l’ouest du pays » se sentait « touché » par le drame et que les habitants de Van « n’étaient pas seuls », que « l’état turc leur tend la main ».

Sur place en effet les secours s’organisent. L’armée turque a dépêché 11 bataillons, le Croissant Rouge a envoyé plus de 7 700 tentes et 22 000 couvertures et transformé le stade de la ville d’Ercis en centre d’accueil. Le ministère de la Santé a envoyé 145 ambulances et une équipe médicale de 500 personnes, fait évacuer hôpital de Van et monter deux hôpitaux de campagne.

Hostilités

Derrière les appels à la conciliation et l’effort humanitaire, les tensions subsistent néanmoins. Si le pays se mobilise pour venir en aide aux populations sinistrées, certaines réactions d’hostilités dans la presse attestent du malaise qui s’est installé en Turquie depuis la reprise des combats entre l’armée et le PKK cet été.

Outre les blogueurs et les nombreux tweets qui voient dans la catastrophe une vengeance divine contre l’attentat de jeudi dernier, un présentateur renommé de la chaine d’information Habertürk, Duygu Canba, a déclenché un scandale après avoir déclaré en direct lundi soir qu’il était peiné pour les victimes  « même si » cela se passait dans la province kurde de Van.
Munge Ali, un présentateur de la chaine ATV, a quand à lui ironisé sur les demandes d’aide d’une population qui selon lui à l’habitude de « chasser les soldats kurdes comme des oiseaux« .

Si les intéressés ont du s’excuser publiquement,  certains journalistes et forces de l’ordre ont été par la suite accueillis à Ercis, l’épicentre du séisme, par des jets de pierres, ce à quoi la police a répondu à coups de gaz poivre.

A l’heure même où le séisme frappait le Kurdistan,  des centaines de milliers de personnes défilaient dans les rues des grandes villes du pays contre le PKK en hommage aux soldats tombés dans l’attaque d’Hakkari.

Suite à ce qui apparente plus à un acte de guerre qu’un attentat terroriste, l’armée turque a lancé la semaine dernière une vaste opération aérienne et terrestre dans le nord de l’Irak   et  encerclerait aujourd’hui les monts Kandil où se cache le QG de l’organisation.

Le + du Grand Turc: Alors que le nombre de sans-abris augmente et que la temperature descend, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan s’est enfin résolu à accepter l’aide de ses voisins.
Il coupe ainsi l’herbe sous le pied du principal parti d’opposition, le CHP, qui lui reprochait sa gestion  de la crise et notamment son refus de l’aide étrangère. On se souvient qu’en 1999 la mauvaise gestion du terrible tremblement de terre d’Izmir – qui avait fait plus de 17 000 morts-  avait précipité la chute du gouvernement CHP de Bülent Ecevit et l’arrivée au pouvoir de l’AKP trois ans plus tard.

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LA FRANCE ET LA TURQUIE COORDONNENT LEURS EFFORTS ANTI-TERRORISTES

Après la sortie du président sur le génocide arménien hier à Erevan, Claude Guéant a signé ce matin à Ankara un accord de coopération sécuritaire sans précédent.

Le ministre de l'Interieur M. Claude Géant et son homologue turc, M. Idris Naim Sahin (AFP)

La France et la Turquie ont signé aujourd’hui, à l’occasion de la visite du ministre de l’Intérieur, M. Claude Guéant, un accord de coopération en matière de lutte contre le terrorisme et le crime organisé, une première dans l’histoire turque.

« Cet accord a des dimensions techniques et opérationnels [..] Il permettra aux forces de sécurité françaises et turques de lutter ensemble sur le terrain » a-t-il déclaré devant la presse, après avoir fait part de « la détermination totale et indéfectible » de la France aux cotés de la Turquie dans sa lutte contre le terrorisme du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK).

Le groupe séparatiste kurde a repris l’offensive cet été dans le sud-est du pays contre l’armée turque et l’une des branches radicales, les Faucons de la liberté du Kurdistan (Tak) a revendiqué l’attentat d’Ankara qui a fait trois morts le 20 septembre dernier.

L’accord de cessez-le-feu signé la semaine dernière entre Téhéran et la branche iranienne du PKK, le PJAK, fait de plus craindre à la Turquie que le Kurdistan irakien ne  serve désormais de corridor entre l’Iran et la Syrie, alors même que le Premier ministre turc hausse le ton contre Bachar el-Assad.

Les réseaux francais du PKK

La France, qui abrite la deuxième communauté kurde d’Europe, est régulièrement la cible des critiques d’Ankara, qui l’accuse d’accueillir les réseaux mafieux finançant le PKK.

Claude Guéant a rappelé que la police française avait procédé cette année à 32 interpellations de membres supposés de l’organisation, contre 38 l’an dernier, la dernière en date il y a deux semaines dans la région marseillaise.
Le 2 novembre prochain s’ouvrira à Paris le 18 turcs d’origine kurde interpellés en 2007 pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, blanchiment d’argent et financement d’une organisation terroriste. Parmi eux se trouvent Riza Altun, et Nedim Sellen, respectivement le représentant officieux du PKK en Europe et son « trésorier ».

La Turquie reproche à la France de ne pas accepter l’extradition sur son territoire de personnes condamnées dans le cadre de ces procédures, un point qui ne devrait pas être à priori remis en cause cet accord.

Petit tollé

Cet accord intervient alors que le Président de la République Nicolas Sarkozy en visite hier à Erevan a appelé Ankara à reconnaitre le génocide arménien d’ici la fin de son mandat à l’Elysée, ce que la France a fait en 2001 à l’instar d’une vingtaine d’autres pays.

Ces déclarations ont déclenché un petit tollé en Turquie, où le sujet reste extrêmement sensible. Le ministre des Affaires Etrangères turc M. Davutoglu a réagi ce matin en lui renvoyant la balle: « ceux qui ne sont pas capable de regarder en face leur histoire après des siècles de colonialisme […] ne devait pas donner de leçons d’histoire à la Turquie » a-t-il déclaré, taxant Nicolas Sarkozy d’ « opportunisme » a quelques mois de l’élection présidentielle.

Les autorités arméniennes estiment que jusqu’à 1,5 million d’Arméniens ont été tués par les Turcs de l’empire Ottoman pendant la Première guerre mondiale. La Turquie affirme que ce nombre est exagéré et refuse la qualification de « génocide », ce qui pèse notamment sur son dossier de candidature à l’Union européenne.

Le ministre des affaires Européennes turc, M. Egemen Bagis, a quand à lui conseiller au président d’« abandonner le rôle d’historien et de se concentrer plutôt sur des solutions pour sortir la France de la crise », ceci quelques heures avant d’accueillir ce matin avec diplomatie son bras droit et ministre de l’Intérieur pour signer l’accord de coopération…

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DOROTHEE SCHMID: « L’AKP PEUT SERVIR DE MODELE AUX PARTIS ISLAMISTES SUR LE PLAN ECONOMIQUE »

Alors qu’Al-Qaeda a annoncé hier s’être choisi un nouveau leader, Dorothée Schmid revient sur les liens complexes entre l’AKP et les diverses mouvances islamistes de la région.
Docteur en Sciences Politiques, Dorothée Schmid est directrice de recherche à l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI), en charge du programme « Turquie Contemporaine ».

Dorothée Schmid

Avant d’aller plus loin, pouvez-vous nous dire quelles ont été les réactions en Turquie à l’annonce du décès de Ben Laden ?

Du côté gouvernemental, la réaction officielle a été extrêmement claire, sans aucun malaise : le président Abdullah Gül a accueilli avec « beaucoup de satisfaction » la nouvelle, rappelant au passage que la Turquie était engagé de longue date dans la lutte contre le terrorisme, comprenez le terrorisme kurde.
La population turque a quand à elle dans sa grande majorité réagi avec indifférence à l’annonce de l’opération, même si on a pu constater de manière très marginale quelques manifestations de contestation.

La Turquie a été frappée par Al-Qaeda en 2003 dans plusieurs attentats qui ciblaient essentiellement des intérêts étrangers (une succursale d’HSBC, l’ambassade britannique…). Ce pays, qui a historiquement aboli le califat pour le remplacer par un régime laïc, devrait constituer une cible prioritaire pour une organisation qui prône son rétablissement. Comment expliquer ce calme relatif ?

Al-Qaeda vise en priorité les pays occidentaux ou considérés comme occupés par des troupes occidentales, comme l’Irak.  Ce n’est pas le cas de la Turquie, qui a certes instauré une forme -très particulière- de laïcité mais reste à 99,9% composée de musulmans sunnites. Son gouvernement, d’origine ou d’idéologie islamiste, comme on veut, utilise de plus la question religieuse en politique intérieure comme en politique extérieure et n’est donc pas comme certains de ses voisins dans une rhétorique de lutte contre l’islamisme à l’échelle internationale.
Le pays n’a donc jamais représenté une cible « prioritaire » pour l’organisation, qui l’a cependant menacé fin 2009 pour sa participation à l’ISAF en Afghanistan, quand il a pris en charge le commandement central à Kaboul.

La Turquie annonce pourtant régulièrement l’arrestation de militants d’Al-Qaeda sur son sol, comme ce fut encore le cas le mois dernier. Certains accusent les autorités de se servir de la lutte contre l’islamisme radical pour mettre en prison des militants du Hezbollah turc, un mouvement kurde….

En toute franchise, c’est très difficile d’y voir clair dans la mesure où beaucoup d’opérations de police en Turquie se passent dans une grande opacité et que le Hezbollah turc est lui même un mouvement assez mystérieux que l’on soupçonne d’avoir été monté par l’armée et les services secrets pour lutter contre le PKK. Chacune de ces arrestations est donc l’occasion pour l’opinion publique turque d’y voir un règlement de compte entre le gouvernement et des mouvements kurdes.
D’une manière générale, quand une bombe explose en Turquie, il est toujours assez difficile de l’attribuer. Plusieurs mouvements locaux sont capables de préparer un attentat, mais ne sont généralement pas lié à l’islam radical.

Le Jerusalem Post annonçait cet hiver qu’à en croire un câble diplomatique diffusé par Wikileaks, la Turquie aurait fermé les yeux sur des caches d’armes installées au Kurdistan par Al-Qaeda en Irak. Qu’en est-il selon vous ?

Aucune information sérieuse n’a été publiée sur le sujet et la nouvelle n’a donné lieu qu’a très peu de débat en Turquie. Le câble ne met pas en avant une quelconque intention de l’armée turque d’aider Al-Qaeda en Irak mais souligne plutôt leur incapacité à surveiller leur frontière est, qui soit dit en passant est effectivement une véritable passoire. C’est une plaque tournante pour toutes sortes de trafics dans lesquels peuvent être impliqués aussi bien des groupes islamistes que le gouvernement turc ou des militants kurdes.

En Egypte et en Tunisie, les Frères Musulmans et le parti Ennahdha multiplie les références à l’AKP depuis le début du « Printemps Arabe ». A quoi peut-on attribué cette soudaine notoriété ?

Question de stratégie politique. L’AKP peut servir de modèle parce qu’il a réussi légitimer certaines mesures islamistes dans le débat public,  à « blanchir » presque l’image de l’islamisme politique aux yeux des occidentaux, mais aussi pour ses réussites concrètes dans la gestion de la Turquie, notamment sur le plan économique.
Les révoltes en Tunisie et en Egypte a ouvert un espace d’expression pour des partis qui ont surtout l’habitude de la clandestinité, il est donc normal qu’il prenne un modèle qui a lui l’expérience de la vie politique. C’est une manière de se légitimer.

Quels sont les liens entre l’AKP et les autres partis islamistes de la région ?

On sait qu’il existe des liens personnels entre certains membres de l’AKP et des partis en question, et la Turquie entend bien en jouer pour peser dans la reconstruction de ces pays.  Tout en gardant une posture attentiste vis-à-vis des régimes contestés par les révoltes, les dirigeants turcs savent qu’ils doivent préparer l’avenir et ont réactivé depuis le début des événements un canal diplomatique religieux avec certaines personnalités des mouvements islamistes.

De plus, il a toujours existé des contacts entre l’AKP et le Hamas, et ce depuis la création du parti, même si ce dernier a un peu de mal à l’assumer. Le secrétaire général de l’organisation palestinienne, Kaled Mechaal, a déjà lui-même été invité en Turquie mais ce fut à initiative du parti AKP  et non du gouvernement.

A ce propos, une nouvelle « flottille pour la paix » se prépare d’ici la fin du mois. Peut-on y voir un lien avec l’avancée des élections législatives turques de la mi-juillet à la mi-juin, certains espérant peut-être profiter de l’« effet de souffle » ?

Les liens entre l’AKP et l’IHH, l’organisation caritative islamiste qui finance l’opération, sont complexes et là encore assez troubles. On sait qu’il existe des liens personnels entre certains membres des deux organisations mais cela n’a pas de liens avec l’avancement de des élections. L’AKP passe son temps à  manipuler le calendrier électoral en fonction de toutes sortes de paramètres et il est de toute manière difficile de savoir si un nouvel affrontement lui serait favorable.
Je pense au contraire qu’Erdogan n’a pas du tout besoin d’un « Mavi Maramara 2 » alors qu’il peine déjà à gérer la situation en Syrie. Je ne pense pas que cela soit dans ses intentions en tout cas.

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DIDIER BILLION: « L’INTERET STRATEGIQUE DE LA TURQUIE EST DE NE COUPER LES PONTS AVEC PERSONNE »

Didier Billion fait le point pour nous sur la position de la Turquie face au « printemps arabe » qui secoue ses voisins.

Ancien directeur-adjoint de l’Institut de Recherche Internationale et Stratégique (IRIS), Didier Billion en est aujourd’hui directeur des publications et rédacteur en chef de La Revue internationale et stratégique. Spécialiste de la Turquie et du monde turcophone, il est notamment l’auteur de « L’enjeu turc » (Armand Colin 2007).


Quel est la position du gouvernement turc vis-à-vis de la contestation en Syrie, un régime dont elle s’était beaucoup rapprochée ces dernières années ?

Didier Billion

La Turquie et la Syrie ont connu au cours des années 90 une période d’extrême tension principalement due au soutien apporté par le pouvoir syrien au leader kurde Abdullah Öcalan [ndlr : chef du PKK, aujourd’hui en prison] qui avait tout de même été hébergé pendant plusieurs années dans la banlieue de Damas. Son  expulsion à l’automne 98 après une montée des tensions à la frontière a néanmoins ouvert un processus de rapprochement entre les deux pays. Ce mouvement s’est accéléré avec l’arrivée au pouvoir de l’AKP, ce qui s’est traduit par une série de visites réciproques de très haut niveau entre les dirigeants turcs et syriens et la conclusion de nombreux accords économiques.

Cette relation de bon voisinage complique aujourd’hui la situation pour Ankara : les Turcs ne peuvent pas ne pas soutenir les revendications démocratiques des manifestants mais ne souhaitent pas pour autant voir leur voisin être ainsi déstabilisé. Cela explique sans doute pourquoi les prises de position de la Turquie à l’égard des manifestants comme du pouvoir syrien tiennent pour l’instant des conseils ou des demandes : il leur faut critiquer mais pas trop durement.

La Turquie a-t-elle des raisons de craindre pour la stabilité du Kurdistan ?

Un écroulement du régime créerait certainement un vide, un appel d’air dans lequel pourraient s’engouffrer les nationalistes kurdes, un peu comme en Irak en 2003 après l’écroulement du régime de Saddam Hussein. Il y a eu de violentes manifestation kurde en 2004, qui ont été très durement réprimées. Pour l’instant ils ne se sont pas  distingués  dans le mouvement de contestation, qui reste concentré dans le sud et l’est du pays.

Ankara a violemment protesté contre l’intervention de la coalition en Libye avant de finalement participer aux opérations de blocus maritime.  Pourquoi une telle posture ? Les deux pays  n’était pourtant pas très proches ….

De la même manière que pour la Syrie, l’AKP avait quelque peu normalisé les relations avec la Libye ces derniers temps, cela effectivement après une période de froid durant les années 90. En 1996 par exemple, lors d’une visite du président Necmettin Erbakan à Tripoli, Mouammar Kadhafi s’était fendu d’une diatribe contre la laïcité mais avait aussi soutenu les actions du PKK, ce qui n’est pas toujours du meilleur effet dans une réception avec un dirigeant turc (rires).

 Ankara a d’ailleurs dû  rapatrier d’urgence quelques 25 000 expatriés turcs de Libye après le début des bombardements, preuve que leurs relations –économiques du moins- s’étaient largement améliorées. Ce n’est pourtant pas là qu’il faut chercher les raisons de cette opposition, qui était largement destinée à un monde arabe au sein duquel elle veut se faire accepter comme une puissance médiatrice, ce qui est inconciliable avec l’image d’un pays pieds et poings liés aux décisions de l’OTAN -bien qu’elle en fasse partie depuis 1952.

C’est pourquoi les Turcs ont été un peu gênés dans un premier temps.  Ils ne pouvaient acquiescer sans rien dire au risque de se «griller» auprès de leurs voisins, mais ne pouvaient pas non plus se désolidariser complètement des décisions du Conseil de Sécurité. L’intérêt stratégique de la Turquie est de ne couper les ponts avec personne, c’est toute la subtilité de la politique extérieure turque.

Quel rôle la Turquie peut-elle jouer d’une manière générale dans ce printemps arabe ? Un sondage montrait il y a peu qu’elle était majoritairement considérée comme un modèle au Moyen-Orient mais ce « modèle » est-il exportable ?

La Turquie peut à l’évidence servir d’exemple pour les nouvelles élites qui émergent dans ces pays mais je ne crois pas qu’on puisse réellement  parler de « modèle » au sens littéral du terme parce que l’histoire de la Turquie est unique en son genre et sa longue expérience de l’état de droit et du multipartisme lui est particulière. Ce «modèle» n’est donc pas transposable tel quel chez ses voisins qui auraient  pourtant tout intérêt à s’en inspirer, sur le plan politique comme sur le plan économique.

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LA TURQUIE « INQUIETE » DE LA SITUATION EN SYRIE

Alors que l’armée syrienne est entrée hier dans la ville de Deraa, le gouvernement turc a réitéré ses appels au calme et aux réformes.

Des membres d’une organisation humanitaire islamiste manifestant lundi devant l’ambassade de Syrie à Ankara

La Turquie se déclare « profondément préoccupée » par la situation en Syrie et « appelle à la fin des violences » ainsi qu’à « la mise en œuvre de réformes » après l’intervention ce week-end des chars de l’armée nationale contre la ville de Deraa, principal foyer de la contestation contre le régime de Bachar el-Assad.

L’assaut s’est soldé par la mort d’une trentaine de personnes, à en croire les militants des droits de l’homme présent sur place,  ce qui porte à plus de 350 le nombre des victimes civiles depuis la semaine dernière.

Cette intervention fait suite à un entretien téléphonique entre le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan et le président américain Barak Obama sur les situations en Lybie et en Syrie. La Maison Blanche a par la suite exprimé ses « profondes préoccupations » concernant « l’utilisation inacceptable de la violence par le gouvernement syrien ».

Le gouvernement turc a rappelé de plus aujourd’hui à Ankara son ambassadeur à Damas, Ömür Önhon, qui a pu s’entretenir hier avec le nouveau premier ministre syrien, M. Adel Safar.

Il devrait intervenir demain  à Ankara lors d’une réunion exceptionnelle du Conseil de Sécurité Nationale -réunissant les chefs des armées et de l’exécutif turc- pour décider de la réponse militaire à apporter à la situation.

La Turquie, qui partage 880 kilomètres de frontières avec la Syrie, craint un afflux massif de réfugiés sur son sol si tout autant qu’un embrasement du Kurdistan si l’état central syrien ne s’écroule.

Après des décennies de tensions autour de la question kurde, la Turquie s’était rapproché  ces dernières années du régime baasiste, notamment après l’expulsion du leader kurde Abdullah Öcalan en 1998. Ankara et Damas avait supprimé le système de visas entre les deux pays l’an dernier afin de développer leur relations commerciales.

Le + du Grand Turc : malgré le « Printemps de Damas » en 2000 et les espoirs d’ouverture, la Syrie reste au niveau mondial la 5ème puissance militaire par habitant, avec près de 500 000 soldats pour 22 millions de syriens. Pour comparaison, l’armée française compte environ 300 000 hommes pour une population trois fois supérieure.

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ANKARA REGRETTE LE « RÔLE MAJEUR » DE LA FRANCE EN LIBYE

La Turquie regrette que la France ait pris le leadership des opérations en Libye, auxquelles elle ne participera pas.

Vecdi Gönül, le ministre de la Défense turc

La Turquie a exprimé lundi sa surprise face au rôle de premier plan joué par la France dans l’intervention militaire internationale en Libye.

« Il nous est impossible de comprendre le rôle majeur de la France dans ce processus« , a lancé le ministre de la Défense, Vecdi Gönül. « Nous comprenons mal qu’elle soit l’exécutant des décisions des Nations Unies. Mais par la suite, nous avons cru comprendre que c’étaient les Etats-Unis qui étaient aux commandes« , a-t-il ajouté.

La France est le premier pays de la coalition à avoir dès samedi soir ouvert le feu sur le territoire libyen. Un mois après la -courte- visite de Nicolas Sarkozy à Istanbul, les relations entre l’Hexagone et la Sublime Porte ne semble donc pas s’améliorer.

Cette déclaration intervient le lendemain d’une passe d’armes entre les deux pays autour du rôle que doit jouer l’Otan dans cette situation.
Le Quai d’Orsay plaide pour ne pas l’impliquer afin de ne pas envenimer la situation alors qu’Ankara, soutenu en cela par Berlin, oppose son véto à toute action militaire et propose une intervention purement humanitaire, à laquelle s’oppose Paris.

Les représentants permanents turcs et français à l’OTAN, Haydar Berk et Philippe Errera, se seraient d’ailleurs violemment disputés au cours de la réunion de dimanche. La délégation turque reproche notamment aux français de l’avoir tenu à l’écart d’une réunion portant sur les détails de l’opération« Aube d’une Odyssée », à laquelle la Turquie ne participera pas. 

En effet, après s’être farouchement opposé à toute intervention militaire, Ankara a finalement promis d’apporter la « contribution nécessaire et appropriée » pour résoudre la crise libyenne mais se refuse à participer directement aux affrontements : « Nous ne participerons pas avec nos forces de combats. Il est impensable que nos chasseurs larguent des bombes sur le peuple libyen « , a déclaré le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan à des journalistes dans l’avion qui le ramenait lundi d’une visite en Arabie Saoudite.
« Nous voulons que cette intervention militaire prenne fin le plus tôt possible. Dans le passé, des opérations de ce genre ont tourné à l’occupation et occasionné davantage de pertes civiles
« , a-t-il ajouté, en allusion à l’Irak.

La participation de la Turquie à l’opération devrait se limiter aux efforts de « contrôle » maritime en Méditerranée et d’assistance humanitaire sur le terrain.

Le + du Grand Turc : Le 1er décembre 2010, Recep Tayyip Erdogan s’est vu remettre à Tripoli le « Prix international Kadhafi pour les Droits de l’Homme » (!) qui récompense chaque année les hommes politiques ayant « contribué à rendre un service exceptionnel à l’être humain » comme Fidel Castro (1998) ou Hugo Chavez (2004).

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